La vérité historique est souvent victime d’altération et de falsification grossière lorsque le peuple laisse la latitude aux bourreaux de se faire passer pour des martyrs.
Le lundi ,22 Novembre 2021, marque la journée de commémoration de l’an 51 de l’agression barbare lusitanienne (portugaise) perpétrée contre le peuple souverain de Guinée, ayant coûté la vie à plus de 500 paisibles citoyens.
L’ancien Secrétaire Général adjoint de l’Élysée chargé des affaires africaines, Monsieur Jacques Foccard, a dit : « Les Portugais avaient envoyé par mer un commando chargé de libérer des prisonniers capturés par les maquisards dans leur colonie voisine, l’actuelle Guinée-Bissau, et détenus à Conakry. Ils avaient embarqué des opposants guinéens qui voulaient abattre le régime de Sékou Touré. L’opération portugaise avait réussi ; l’opération guinéenne avait échoué.»
En effet, le Dimanche, 22 Novembre 1970, la capitale guinéenne a fait l’objet d’une attaque par des hordes de mercenaires portugais et guinéens : opération ‘’Operação Mar Verde’’ ou ‘’Opération Mer Verte’’.
En guise de rappel, c’était un mois saint de Ramadan. Des cohortes portugaises assistées par des heimatlos guinéens ont tenté de faire basculer le destin de la Guinée. Lourdement armés, ces mercenaires se sont attaqués à plusieurs points stratégiques à Conakry dont les camps Samory et Boiro, l’aéroport de Gbessia et autres. Mais avec l’appel à la mobilisation du Responsable Suprême de la Révolution guinéenne, le camarade Sékou Touré, la vérité a fini par triompher sur le mensonge. Le vaillant peuple de Guinée, dans un élan patriotique, debout comme un seul homme, a écrasé les envahisseurs.
« Dieu a sauvé la Guinée, le peuple l’a défendue », c’est en ces termes que le Président Sékou a remercié le peuple de Guinée après que ce dernier ait réglé le compte aux assaillants.
Reconnu comme le responsable de cette agression, le Portugal a été condamné par le Conseil de sécurité des Nations Unies et l’Organisation de l’Unité Africaine (OUA), devenue l’Union Africaine (UA) depuis 2002.
À ce sujet justement, Madame Biliguissa Diallo a eu l’honnêteté intellectuelle de reconnaitre dans ‘’Guinée, 22 Novembre 1970’’ la participation de son père, le commandant Diallo nommément cité par Alpoïm Carvao dans ‘’Opération Marée Verte’’, à cette attaque barbare contre le peuple souverain de Guinée. Même si par la suite elle tente de justifier, sans y parvenir, la participation de son père à cette tentative de confiscation du destin de toute une Nation par le fait que, selon elle, le Président AST avait instauré un régime dictatorial.
La question qui taraude constamment l’esprit de bon nombre de citoyens est : Pourquoi une frange des guinéens travestit-elle notre glorieuse histoire commune ? Pourquoi ne veut-elle pas que la vérité se sache sur notre passé ? La honte du passé ?
L’ethnicisation et la politisation de notre histoire commune ébranlent le tissu social et compromettent dangereusement notre vivre-ensemble. À proprement parler, ce n’est pas en truquant notre mémoire collective qu’on trouvera la paix.
La mémoire guinéenne est fragmentée du fait de la volonté délibérée d’une partie de l’opinion visant à falsifier, tronquer, ou dénaturer notre histoire.
La jeunesse guinéenne doit refuser la prise en otage de l’histoire de notre patrimoine commun. Elle ne doit aucunement jeter son bonnet par-dessus les moulins face à ces individus qui, délibérément, falsifient notre vécu commun.
Elle doit s’intéresser au parcours de notre pays non seulement pour cesser d’être victime de la désinformation, mais aussi pour barrer la route aux polémistes qui ne cessent de saper à dessein l’opinion. Que personne ne dise désormais qu’il s’agit du passé, donc plus nécessaire de s’y attacher. C’est du passé, certes oui. Mais, le connaitre permet de décoder les manipulations subies par notre histoire et de ramener à l’ordre ces individus qui s’adonnent à cœur joie à ce déshonorant exercice de falsification de notre passé.
Orwell a écrit que celui qui contrôle le passé contrôle aussi le présent. Les jeunes doivent consulter les livres pour mieux s’informer sur le parcours de notre chère Guinée, tout en évitant des ouvrages de seconde main ou des témoignages arrangés, pour un peu reprendre le célèbre historien, Monsieur Sidiki Kobélé Keita. Ils doivent aussi aller à l’école des anciens pour trouver des explications aux interrogations sur notre histoire dont les réponses ne se trouvent dans les ouvrages. Ne dit-on pas généralement qu’un peuple qui ne connait pas son passé, ses origines et sa culture ressemble à un arbre sans racine ?
Les faits sont têtus. Tout comme pour abonder dans le même sens, Nabil Alami affirme : « l’histoire ne peut jamais s’effacer. Elle ne cesse de se ressourcer. »
Il n’y a jamais eu de régime innocent. Il n’y en aura jamais aussi. Indubitablement, le Président Ahmed Sékou Touré (AST) n’est pas Apollon, ce dieu de la pureté dans la mythologie grecque. Mais, le Grand Syli n’est pas non plus Ebène (dieu des ténèbres), comme tente de faire croire une partie des guinéens.
Dans le souci de porter des réponses à la véracité ou non des conspirations permanentes contre notre pays qui ne cessent de sustenter les débats chaque fois qu’il est question de commémorer l’une des dates relatives à ces complots, voici des témoignages accablants des personnes qui étaient soit directement engagées dans certaines de ces conspirations, ou qui avaient vécu certains de ces évènements.
En plus d’éclairer la lanterne des uns et des autres, ces témoignages permettent de réaliser l’étendue et la profondeur de la rancœur des dirigeants français d’alors contre le premier Président de la République de Guinée.
En effet, pendant les vingt-six ans de règne de l’homme qui a débarrassé la Guinée des affres du colonialisme, plusieurs complots ont été ourdis pour faire basculer la révolution guinéenne, au nombre desquels : les complots Ibrahima Diallo de 1959, les complots ‘’Petit Touré’’ de 1965, l’attentat ‘’Tidjane Keita’’ de 1968 sur la personne physique du Président Sékou Touré à l’occasion de la visite d’Etat du Président Kenneth Kaunda de la Zambie, le complot ‘’Kaman Fodéba’’ de 1969’’, l’agression impérialo-portugaise de 1970, le complot ‘’Diallo Telly’’ de 1976, l’attentat à la grenade au Palais du Peuple dans la nuit de la célébration de la fête du 14 Mai 1980 etc….
Monsieur Jean Faraguay Tounkara, ancien Ministre des sports du premier Gouvernement de la Guinée indépendante n’avait-il pas reconnu dans le journal ivoirien ‘’Ivoire soir’’ qu’il était la tête pensante du complot Kaman-Fodéba de 1969 ?
Avez-vous parcouru ‘’les Blancs s’en vont’’ de l’ancien premier Ministre français, Monsieur Pierre Messmer ? Et ’’la ‘’Piscine’’ de Pascal Cropp et Roger Faligot ?
Ces différentes œuvres attestent avec éloquence la véracité des conspirations ourdies par le pays de De Gaulle de 1958 à 1984 avec l’aide des complices internes pour tenter de déchoir le régime de la Révolution guinéenne.
Dans ‘’la Dépêche diplomatique’’ et ‘’Foccard parle’’, Foccard a reconnu avoir travaillé avec des opposants guinéens pour le renversement de Sékou Touré.
« Quand Sékou Touré a parlé de complots organisés à partir du Sénégal, tout le monde a ri. On disait que c’était encore une invention de sa part. Mon devoir était de faire une enquête. Alors j’ai fait fouiller toute la frontière. Et on a découvert les fameuses munitions, les tracts… qui étaient destinés à la contre-révolution. Il y avait bel et bien complot. J’ai fait arrêter des suspects, des Guinéens qui vivaient à Dakar et un militaire français qui était chef de l’organisation ; il résidait à Saint-Louis où je l’avais fait interner. On l’a fait évader» Fin de citation.
Empli de remords pour avoir participé à ces opérations de déstabilisations de la Guinée, Monsieur Foccard a reconnu non seulement la capacité de résilience du Président Sékou Touré, mais aussi lui a demandé pardon en ces termes : « Bravo Monsieur le Président. J’ai tout essayé pour vous démettre du pouvoir et pour vous assassiner. J’avoue qu’avec vous j’ai échoué sur toute la ligne. Ce qui m’est rarement arrivé. Du fond du cœur, je vous demande pardon, Excellence ! »
Mamadou Dia dans ‘’Les Mémoires d’un Militant du tiers-monde’’, parues en 1964, note que les complots de 1961 et de 1965 sont le fait de la France et des opposants guinéens dont Monsieur Siradiou Diallo.
Également, dans ‘’Lettres d’un vieux militant’’, publié en 1991, Dakar, GIA, adressée au Président français d’alors, le Général De Gaulle, Monsieur Dia affirme : « Pour revenir sur le cas de la Guinée, disons que le fait d’avoir voté « Non » au référendum lui a valu d’essuyer maints complots ourdis par l’extérieur. En 1959, hélas, les comploteurs étaient bel et bien basés et entraînés au Sénégal. Après le communiqué de Sékou Touré diffusé à l’époque par Radio-Conakry, communiqué dans lequel le Président guinéen accusait le Sénégal, j’ai dû me rendre personnellement à la frontière de Kédougou pour vérifier et, procédant à des fouilles, je découvris à mon grand désappointement, des armes et du matériel que je fis saisir et ramener à Dakar. À Dakar où – ce sera une seconde découverte – était dressé un camp d’entraînement pour des mercenaires. Le conseil de défense, où siégeaient notamment le haut-commissaire de la France, le général commandant supérieur des forces françaises du point d’appui de Dakar, le général commandant la zone Nord, fut immédiatement convoqué par mes soins. Ils se montreront offusqués par ma déclaration liminaire : « Messieurs, je suis au regret de vous dire que tout ce que Sékou Touré a affirmé est la stricte vérité. J’ai la preuve qu’un complot contre la Guinée s’est ourdi à Dakar.» Je les invitai, ensuite, à venir voir dans un bureau attenant à la salle de conseil, les armes, munitions, grenades et affiches que j’y avais fait entreposer. Après quoi, j’adressai à de Gaulle une vigoureuse lettre de protestation et fis arrêter deux Français impliqués dans l’affaire. Ils réussiront à s’enfuir. Je les ferai prendre et emprisonner à Saint-Louis ; on les aidera à s’évader. Des Guinéens, également, avaient été arrêtés ; mais ce qu’ils déclareront à l’enquête était si grave que je dus, pour des raisons d’État, les relâcher. Aujourd’hui, bien que délié de mes obligations d’autrefois, je garde encore le silence là-dessus par souci de déontologie politique. »
L’ouvrage ‘’la politique africaine d’Houphouët-Boigny’’ de l’ancien conseiller spécial de Félix Houphouët-Boigny, Monsieur Jacques Batmanian, communément appelé Jacques Baulin, dépeint le rôle néfaste que le premier Président ivoirien a joué à l’époque dans la déstabilisation politico-économique de la Guinée.
Je vous adjure de parcourir le livre intitulé ‘’Opération Marée Verte’’ de Alpoïm Carvao, commandant militaire de l’agression du 22 novembre 1970, qui a reconnu avoir conduit une opération militaire contre la Guinée, de connivence avec le FLNG de Siradiou Diallo et du commandant Thierno Diallo, non seulement pour abattre le régime guinéen, le Parti Africain de l’Indépendance de la Guinée-Bissau et des Iles du Cap-Vert (PAIGC) de Amilcar Cabral et installer un régime fantoche à la solde des puissances impérialistes.
N’oubliez pas non plus de lire ‘’Du Camp Boiro’ ’ ou ‘’La Guinée de Sékou Touré : pourquoi la prison du camp Boiro ? ‘’ du célèbre historien guinéen, Monsieur Sidiki Kobélé Keita.
Dans cet ouvrage, Monsieur Kobélé, dans le souci de rétablir la vérité, ‘’démontre point par point en quoi le pamphlet ‘’Camp Boiro, Parler ou Périr’’ de Monsieur Réné Gomez est un récit tendancieux, partial et partiel dont il faut absolument se méfier.’’
Concernant le cas de l’ancien Ministre de la Justice, Monsieur Diallo Telly, qui occupe très souvent le débat chaque fois qu’on parle des conspirations, Monsieur Madifing Diané, ex-Ministre de la sécurité et grand témoin de l’histoire sous la première République, affirme: « Le complot de 1976 touche l’une des plus grandes personnalités du pays. (…) Telly a voté OUI au référendum de 1958. (…) Telly a participé au complot de 1969. C’était son complot. Il était au courant et a participé à l’agression de 1970. Sont intervenus pour lui, les Présidents Moussa Traoré du Mali, Yakubu Guwon du Nigeria, Gaafar Nimeiry du Soudan, Siad Barre de la Somalie et Dr Alfred Quenun, Directeur de l’OMS pour l’Afrique (…). Le cas de 1976, Telly a été dénoncé par sa propre famille. C’est évident. Son fils Thierno était assis à la dénonciation, par sa maman, épouse de Telly. Telly a été dénoncé par un certain Amadou Diallo qui a écrit un livre : « la mort de Telly ». C’est ce même jeune qui a dénoncé le capitaine Lamine Kouyaté et Sékou Philo Camara .Cet Amadou Diallo était un agent double de la DSGE française. Il était étudiant à Orléans quand il a été recruté. Il est rentré en Guinée par l’Algérie. Il est venu jusqu’à nos bureaux sur recommandations… »
En outre, l’ancien ambassadeur français en Guinée, Monsieur André Lewin, avait clairement écrit que tous les complots dénoncés par le Président Sékou Touré étaient vrais et tous étaient d’inspiration française.
Dans ses confessions en 2004, Monsieur Maurice Robert, chef du secteur Afrique du SDECE de 1958 à 1968, a, lui aussi, reconnu l’acharnement de la France contre la Guinée en ces termes : « Nous devions déstabiliser Sékou Touré, le rendre vulnérable, impopulaire et faciliter la prise du pouvoir par l’opposition. Une opération de cette envergure comporte plusieurs phases : le recueil et l’analyse des renseignements, l’élaboration d’un plan d’action à partir de ces renseignements, l’étude et la mise en place des moyens logistiques, l’adoption de mesures pour la réalisation du plan. »
Le même Maurice Robert avoue: « Avec l’aide d’exilés guinéens refugiés au Sénégal, nous avons aussi organisé des maquis d’opposition….. L’encadrement était assuré par des experts français en opération clandestine. Nous avons armé et entrainé ces opposants guinéens, dont beaucoup étaient…… pour qu’ils développent un climat d’insécurité et, si possible, qu’ils renversent Sékou Touré. Parmi ces actions de déstabilisation, je peux citer l’opération ‘’Persil’’, par exemple, qui a consisté à introduire dans le pays une grande quantité de faux billets de banque guinéens dans le but de déséquilibrer l’économie. »
Du fait du caractère trop sensible du sujet, j’ai enlevé les mots se rapportant à la région ou à l’ethnie. C’est ce qui explique d’ailleurs les points de suspension dans le témoignage ci-dessus.
L’opération Persil ?
D’énormes dispositions ont été prises par le France pour que les millions de Franc FCA restés sur le territoire guinéen après son accession à l’indépendance soient inexploitables au Mali ou au Sénégal, en refusant de faire paraitre le Décret d’émission qui permet d’authentifier les billets selon le territoire africain.
Persuadé de la réussite de cette opération de sabotage habilement organisé, Monsieur Marcel Le Roy-Finville affirme : « Sékou Touré se trouve avec une monnaie inexportable, ruiné, aux abats. Il est à plat ventre, comme le souhaitait le Général. » C’était très mal connaitre l’aptitude de résilience et de résolution du Président Sékou Touré à défendre sa Patrie.
Dans l’édition du 6 mai 1959 du Canard Enchaîné, on lit : « N’empêche qu’on y pense très fort à reconquérir la Guinée, et à la remettre dans le droit chemin communautaire. Et même, si l’on en croit d’aucuns, la chose a failli se produire la semaine dernière. Un joli Sékou de Jarnac avait été préparé contre M. Touré. Mais, ajoutent les gens bien renseignés, la chose aurait été éventée au dernier moment ″because l’Intelligent Service″qui, toujours compatissant, prévint à temps le ″dear″ Sékou Touré de ce qui se tramait. On espère faire mieux la prochaine fois. »
Ces troublantes révélations des chefs d’orchestre de ces crapuleuses conspirations contre l’homme du NON à De Gaulle ne donnent-elles pas raison à la Révolution guinéenne ?
En plus d’être un grand maitre de la parole qui savait tenir en haleine un auditoire de milliers de personnes pendant des heures, le Président Sékou Touré était un fin stratège. Ayant des oreilles et des yeux partout, il a pu démanteler toutes ces conjurations.
Une histoire invraisemblable ! À la question de savoir pourquoi il a été mis sous les verrous en 1971, Monsieur Abbas Bah, l’ancien président de l’association des victimes du camp Boiro, répond : «Sékou Touré m’a arrêté parce que je suis d’une bonne famille, l’un des descendants de Thierno Aliou Mandian de Labé »
Honnêtement parlant, peut-on arrêter quelqu’un à cause simplement de son appartenance familiale ? Pourquoi vouloir mordicus trimballer la mémoire du Grand Syli dans la boue?
Des guinéens, rongés et assombris par la haine, cherchent vaille que vaille à ternir la mémoire du Président Sékou. Comment tailler l’histoire de notre pays à leur guise et faire accepter à tous, est leur seule et unique préoccupation. Ils passent leur temps à dénigrer la Révolution guinéenne et accuser AST de tous péchés d’Israël, mais ne parlent jamais des témoignages cités ici.
Ces falsificateurs de l’histoire de la Guinée pensent souvent jouer au plus fin. Mais, ils oublient que le peuple de Guinée n’est point un peuple dupe. C’est un peuple aguerri.
La vérité historique prise au piège de l’émotion en Guinée?
La réconciliation en Guinée, comme c’est ce qui fait florès, ne sera possible que lorsque la vérité historique sera rétablie dans toutes ses apparences et dimensions.
Malheureusement, plus d’un guinéen a l’impression aujourd’hui que l’histoire de notre patrimoine commun est en train d’être lue dans son sens inverse. Qu’est-ce qu’on fait de la mémoire du célèbre commissaire Mamadou Boiro qui avait été parachuté d’un avion en plein vol au cours de son trajet Kankan-Conakry par quatre commandos parachutistes pendant qu’il exécutait une mission régalienne? Qu’est-ce qu’on fait de la mémoire des victimes de l’agression 1970 ? Et ces nombreuses victimes des complots perpétrés contre le peuple de Guinée ? Et les jeunes tombés lors des évènements de Janvier-Février 2007 ?
« Nul n’a le droit d’effacer une page de l’histoire d’un peuple, car un peuple sans histoire est un monde sans âme», dit le journaliste Alain Foka.
Avant de rétablir la mémoire de qui que ce soit, la bonne démarche serait de mettre en place un Organisme chargé de la réconciliation qui doit avoir pour mission de rouvrir les procès et demander à la France la déclassification de tous les dossiers relatifs aux complots que notre pays a connus depuis 1958. Cela nous permettra de savoir qui est bourreau, qui est martyr. Nul besoin d’affirmer que ces dossiers existent bel et bien dans les archives françaises.
Plutôt que de se limiter aux gesticulations mémorielles ou de rabaisser le débat au rang des scènes auxquelles le peuple ne comprend rien, ces prétendues victimes de la première République feraient mieux aujourd’hui de demander la réouverture des procès, puisque la loi leur en donne le droit. À l’issue de cela, l’Etat pourra s’engager dans un éventuel processus de rétablissement de la mémoire des innocents.
Il importe de rappeler ici que c’est sur la base des verdicts rendus par les Tribunaux populaires révolutionnaires que ces prétendues victimes ont été condamnées.
Kaman Diaby, Barry Diawadou et autres n’ont-ils pas été cités dans des complots ? Pourquoi ne pas construire aussi des stèles pour : le Général Noumandjan Keita, le Général Toya Condé, le colonel Diara Traoré, Bangoura Kassory, Kaba Laye de Kankan, Petit Touré, pour ne citer que ceux-ci, qui ont le même statut que les premiers ?
N’oubliez pas aussi de rétablir l’ancien Président de l’Assemblée Nationale Monsieur Damantang Camara, Karim Kéira, ancien Ministre de l’intérieur, Mamadi Keita, Ministre de l’éducation à l’époque, Seydou Keita, le beau-frère de Sékou Touré, Moussa Diakité, membres du Gouvernement, le Général Toya Condé ,les colonels Diara Traoré, Idrissa Condé, Chef de bataillon Abdourahamane Kabassan Keita, les commandants Jean Matos , Zoumanigui Kèkoura , Siaka Touré, Sidiki Condé, Kémoko Keita, Yaya Touré, Mory Traoré, Lancei Camara, Nounké Keita, Fodé Sangaré, Abdourahamane Kaba, Sidi Mohamed Keita, les capitaines Mandiou Touré, Alfa Touré ,les capitaines Bakary Sako, les capitaines Mandiou Touré, Alpha Touré, Mamadi Condé, Facely Konaté, Mamadi Mansaré (Directeur de l’école Militaire), Mohamed Lamine Sacko , Mamadi BAYO , Lancime Keita (Fankama), Oumar Kébé, Bakary Sacko, Sékou Traoré, Bawourou Condé, Amadou Kouyaté pour ne citer que ceux-ci.
En clair, pour éviter de porter atteinte ou de mutiler la mémoire collective du vaillant Peuple de Guinée, il faut s’assurer de l’innocence d’une personne avant de célébrer sa mémoire. Il n’est nullement aberrant de faire des commisérations, mais aller jusqu’à faire croire que des citoyens dont les noms ont été cités dans des complots avaient raison pour leurs manœuvres contre leur propre pays, alors qu’il y a aussi d’autres dans le même cadre qui semblent aujourd’hui être dans les oubliettes, c’est franchir l’infranchissable. Donc, aller au-delà des limites.
L’histoire de la Guinée est si sensible et si complexe parfois que nombre de guinéens s’abstiennent d’en parler. Mais comme des guinéens veulent résolument que nous dépoussiérions tous ces dossiers, nous nous attèlerons volontiers à ce délicat exercice afin d’arrêter net l’installation perpétuelle de la confusion dans l’opinion.
« Quand on danse avec un aveugle, il faut le piétiner de temps en temps pour qu’il ne se sente pas seul sur la piste», nous enseigne une sagesse mandingue.
Nous devons avoir le cran d’assumer ensemble notre histoire commune et être fiers de notre chère Guinée. Oui, nous sommes ce grand peuple qui a dit Non le 28 Septembre 1958 au referendum établissant une communauté franco-africaine, tendue par le Général De Gaulle lors de son périple en terre africaine pour défendre cette idée de communauté.
L’ancien Président du Parlement guinéen, l’honorable Aboubacar Somparé (paix à son âme), disait dans ‘’le Grand débat’’, parlant bien entendu de la figure de proue de notre souveraineté, je cite : « Sékou Touré est le plus grand des chefs d’Etat que l’Afrique a connus. Il est mon idole. Je suis prêt à le servir même s’il se réveille maintenant sans même réfléchir.»
Plus loin, l’honorable Somparé affirme: « Ceux qui traitent Sékou Touré de ‘’dictateur’’ ne le connaissent pas ; ces gens confondent les apparences et la réalité. Sékou Touré était juste. Il est mort, il n’avait pas un centime. Dans un régime politique, il y a plusieurs individus qui n’ont pas les mêmes intentions.»
À vrai dire, plus de trente-sept (37) ans après son rappel à Dieu, l’ombre du Responsable Suprême de la Révolution guinéenne continue toujours de planer sur la Guinée. Ce grand tribun reste omniprésent dans la conscience collective du vaillant peuple de Guinée. En clair, AST était un grand homme pour le berceau de l’humanité. Audacieux et véridique, sa disparition a créé un énorme vide pour le continent africain.
Paradoxalement, pendant que des guinéens continuent de vilipender la mémoire du Président Sékou Touré, ailleurs il est célébré comme étant l’un des plus grands fils du continent africain. Des rues, des hôpitaux et autres symboles de l’Etat portent le nom de ce panafricaniste incontesté et incontestable en Zambie, au Mozambique, au Ghana et autres.
En résumé, l’émotion doit être évitée dans le traitement des dossiers se rapportant à ces délicates pages de l’histoire de notre pays, car en plus de chasser la vérité, l’émoi compromet dangereusement la réconciliation.
« L’histoire ne se fiche pas mal que vous rongiez les doigts», a dit l’écrivain Arthur Koestler.
Vive le glorieux Peuple victorieux du 22 Novembre 1970 !
Sayon Mara, Juriste