La puissante Fédération Syndicale Autonome des Banques et Assurances de Guinée (FESABAG), est très remontée contre des décisions de justice qui ont été rendues récemment contre deux banques primaires de la place.
La toute première question qui se pose est de savoir pourquoi c’est le syndicat des travailleurs qui se lance dans cette guerre contre des » magistrats véreux » selon son communiqué et non l’Association Professionnelle des Banques (APB) qui constitue en quelque sorte le syndicat des patrons de banques.
Des condamnations judiciaires en cascade contre des établissements bancaires et toute autre entreprise d’ailleurs, constituent un risque pour eux. Outre le fait qu’ils perdent de l’argent, il y a lieu de craindre que des difficultés économiques ne les contraignent à mettre la clé sous le paillasson. On peut imaginer les conséquences d’une telle situation en terme de pertes d’emplois. De ce point de vue, on peut comprendre les préoccupations de la FESABAG. Mais lorsqu’elle est la seule à se faire entendre pendant que l’APB se mure dans un silence inexplicable, on doit se poser des questions. On a même l’impression parfois que les intérêts des salariés et des employeurs sont opposés dans cette affaire. En effet, pendant que la FESABAG déclare que ce service minimum ne sera pas assuré ce lundi dans les banques, l’APB affirme le contraire.
Par ailleurs, le Secrétaire général de la FESABAG a été imprudent dans sa communication en parlant de « magistrats véreux » sans indiquer l’identité de ces magistrats. Chaque magistrat et l’institution judiciaire de façon générale peuvent se sentir atteints dans leur honneur et leur dignité. Si des noms précis avaient été cités avec des preuves à l’appui, il y aurait eu moins de réprobation. Encore qu’il existe des voies de recours et la possible de saisir le Conseil supérieur de la magistrature. La Guinée est l’un des rares pays où même l’insuffisance professionnelle du magistrat constitue une faute passible de sanction disciplinaire.
Mais il faut relever que les journalistes qui tombent à bras raccourcis sur Monsieur Abdoulaye Sow ne sont pas bien placés pour lui donner des leçons de respect et de tempérance lorsqu’ils parlent de la justice ou des magistrats. Quand on écoute certaines émissions de talk-show, on est pris d’inquiétude tellement les mots employés par certains chroniqueurs sont déplacés et à la limite de l’injure, de la diffamation ou de l’outrage. Ce n’est pas une manière de défendre M. Abdoulaye Sow. Mais chacun doit savoir raison garder et ne pas accabler autrui pour des faits dont il est arrivé qu’on se rende soi-même coupable par le passé.
Pour régler cette affaire, il serait sage que Monsieur Abdoulaye Sow et son ou ses conseil.s adoptent le profil bas en présentant des excuses publiques aux magistrats. Même si cette démarche n’éteint pas l’action publique, il pourrait bénéficier d’une dispense de peine au cas où sa culpabilité serait reconnue.
Cependant, il faut que la justice accepte elle aussi de faire son introspection et son autocritique.
Me Mohamed Traoré
Ancien Bâtonnier